mercredi 6 mai 2009

Malvern #03

Discothèque Le MalvernMalvern, vue des mezzanines - Crayon sur papier calque, 29.7x42 cm
Malvern, view of the mezzanines - Graphite on tracing paper, 11"69x16"


Les mezzanines forment, en réalité, un seul plateau surplombant les deux salles principales de Malvern. Dépourvu de piste de danse, cet espace de détente ouvert de part et d'autre, avec bar, tables et fauteuils, constitue un lieu charnière auquel on accède facilement grâce aux trois escaliers montrés précédemment. Bien qu'il soit situé dans un volume résiduel de l'édifice, à la jonction des toitures du bâtiment et de la tour au-dessus de l'entrée, sa localisation en fait un point d'observation privilégié des pistes de danse.
Il avait d'abord été envisagé que la discothèque n'ouvrirait qu'une seule salle du rez-de-chaussée au public durant la morte saison. Il fallait alors pouvoir limiter les déambulations des visiteurs, au-delà de la surface de mezzanine affectée à cette salle, par l'installation d'une grille ou d'un système équivalent. Cette suggestion a été abandonnée très vite, mais l'idée d'une lourde herse, matérialisant cette frontière virtuelle entre les espaces, a été conservée. Naturellement, la herse est fixe et, comme le reste, elle participe pleinement du décor. Passer sous ses pointes produit néanmoins une étrange sensation.

Discothèque Le MalvernUne longue balustrade, elle aussi d'inspiration médiévale, protège chaque mezzanine. La caractéristique des éléments d'architecture ou de mobiler médiévaux, antérieurs à la période gothique, est la simplicité du dessin qui n'empêche pourtant ni la richesse ni la diversité des formes et des motifs. Le mobilier usuel, par exemple, était plus souvent fait de bois chantourné que sculpté et mouluré. En quelques dessins, nous nous sommes vite aperçus que l'effet recherché paraissait plus crédible quand le décor était traité de la sorte. C'est dans cet esprit que les balustres des mezzanines ont donc été imaginés, tout comme les tabourets de bar et la plupart des fauteuils.

Malvern, détails du garde-corps et gabarit d'un balustre - Encre sur papier calque, 29.7x42 cm
Malvern, details of the balustrade and gauge of a baluster - Ink on tracing paper, 11"69x16"


Dans leurs yeux, il y avait toujours cette sorte de gourmandise que l'excitation de la découverte fait scintiller au moment où de nouveaux dessins étaient présentés. Presque aussitôt pourtant, les architectes, les artisans et le maître d'ouvrage semblaient s'interroger mutuellement du regard, comme pour jauger cette brillance dans l'oeil de leur voisin, avec l'air de leur dire "pensez-vous être capable d'aller jusque là ?". Peut-être était-ce aussi pour y chercher du courage. Et ils n'en manquèrent pas.

A suivre...

8 commentaires:

Saturnas a dit…

Voilà un travail de menuiserie qui m'aurait bien plu (même si ça devient un peu du travail à la chaîne). Tout cela a l'air bien excitant. Tu a dessiné tous les détails de chaque élément ? C'est un travail de fourmi !

Thierry COQUELET a dit…

Rétrospectivement, on peut dire que c'était un travail de fourmi, en effet. On commence par des croquis d'intention plus ou moins élaborés, et il y en a toujours un bon paquet pour chaque partie du projet (murs, poutres, portes, mobilier, bars, etc.). Puis, on reprend les croquis qui ont été sélectionnés pour les "assembler" dans des vues générales afin de s'assurer de la cohérence de l'ensemble (avec les modifications qui s'imposent éventuellement).
Ensuite, il faut dessiner les documents à l'échelle destinés aux architectes et entreprises, en allant, cela va de soi, des plans d'ensemble aux plans de détails. La quantité de détails, ainsi que leur échelle de représentation, varie suivant la complexité de l'ouvrage à réaliser. Enfin, comme des imprévus surviennent toujours sur ce type de chantier, il a fallu faire des croquis à la volée, sur place, pour rattraper quelques trucs.
Mais quand on me laisse la possibilité de faire bien mon travail (ce qui est assez rare), je suis d'une patience sans fond dès que j'ai un crayon en main.

Anonyme a dit…

Ce décor me fascine autant qu'il me gêne...Je crois que je l'aime en dessin et que je ne l'aimerais pas "en vrai". Je n'apprécie guère les reconstitutions qui me font immanquablement penser à Disneyland. Par contre le côté "Rois maudits" n'est pas pour me déplaire (j'entends la première des deux dramatiques). Bonjour mes contradictions mais en tous cas travail impeccable !

Thierry COQUELET a dit…

Larkéo > Je pense avoir été honnête depuis le début de cette série sur Malvern : il s'agit bien d'un lieu de divertissement n'ayant aucune ambition de reconstitution historique. Ce n'est qu'un décor, rien qu'un simple décor...
Si je comprends bien qu'il puisse paraître gênant d'associer cette ambiance heroic fantasy à la musique d'aujourd'hui et à ses excès de décibels, aurait-il pour autant fallu imposer un décor de vaisseau spatial ou de parking souterrain ?... La question mérite d'être posée. Elle l'a été en son temps, je te rassure.
Les discothèques ne sont absolument pas des lieux que je fréquente, mais quand la question de leur ambiance se pose (souvent réduite à l'indigence de quelques jeux de lumières), je peux t'affirmer que Malvern n'a pas à rougir ni de ses vieilles pierres, ni de ses tabourets de bar en bois massif.
"Quand je me contemple, je me désole, quand je me compare, je me console". Cet aphorisme s'applique très bien dans ce cas.

Anonyme a dit…

Thierry, oui oui j'ai bien compris qu'il s'agissait d'une discothèque ! Et mon avis ne montre que mes contradictions et non pas un jugement beau/pas beau je crois ? Pour me résumer : j'aime et j'aime pas en même temps ! je ne fréquente pas non plus les discothèques...
je serais toutefois curieuse de voir pour de vrai ce décor pour de faux ;o)

Achde a dit…

quel boulot remarquable ! Seul regret: c'est de se dire qu'on passera de la techno la-dedans!

Le Vieux Paris d'Albert Robida a dit…

Je comprends bien cette excitation du détail, tu dois avoir une démarche similaire à celle d'Albert Robida lors de sa réalisation du Vieux Paris... où l'on se prend au jeu, et on a très vite envie d'imaginer et créer chaque objet, de s'occupe du moindre détail.

Depuis que je participe à des expositions, j'ai le plaisir de rencontrer les scnénographes... des échanges fusent bien sûr, et j'y vais de mes idées, m'impliquant plus qu'il ne faudrait, au risque de froisser la susceptibilité du scénographe. Mais bon, on se laisse facilement gagner pas la frénésie imaginative, et il en ressort toujours quelque chose de positif ;-)

En tout cas, encore et toujours bravo pour tes talents !

laurent

Thierry COQUELET a dit…

Achdé > Beaucoup de personnes se sont étonnées qu'un tel environnement serve de décor à une musique d'énervés (sic). A vrai dire, je ne me la suis jamais posée puisque je savais vers quoi nous allions avant même de commencer. Et puis, cette idée d'un décor pseudo médiéval a été prise collégialement, après quelques essais sur des environnements très différents. Sur le fond, quelqu'aurait pu être ce décor, je l'aurais traité avec les mêmes exigences.
En fait, ce sont peut-être les musiques actuelles qui nous posent un problème de références visuelles. Les images qu'on pourrait leur coller sont mouvantes, incertaines. Comme rien ne colle vraiment, on peut alors imaginer à peu près tout. Toutes proportions gardées, cela me fait penser (entre autres) au film La folie des grandeurs dont l'action se situe au XVIIème siècle, et dont la bande-son, plutôt pop, a été composée par Michel Polnareff...

Laurent > Merci ! En fait je n'ai vraiment traité que les détails les plus importants, c'est-à-dire ceux qui pouvaient être touchés, ou très proches des yeux. A côté de cela, beaucoup de choses dessinées n'ont pas pu être mises en oeuvre, faute de matériaux (par exemple, il y a beaucoup moins de pierre semillée que je ne l'avais prévu), ou de temps...